Volodymir Zelensky ou la grande leçon de politique générale

Si la situation n’était pas si grave, on pourrait accuser Volodomyr Zelensky de plagier Forrest Gump ce personnage que l’on voit aux cotés d’Elvis Presley, de Kennedy, Nixon et même Steve Jobs.

Depuis plus d’un an le Président ukrainien, Volodomyr Zelensky va à la rencontre des dirigeants du monde entier, au Congrès américain, au Parlement européen, en passant par le festival de Cannes, jusqu’à Hiroshima au G7, puis aujourd’hui de retour au front. Alors, oui, le parallèle pourrait être fait avec un scenario, si la situation n’était pas si grave. Crimes de guerre, déportations d’enfants, exactions en tout genre, violation du droit international, propagande contre l’histoire, atteinte aux droits fondamentaux, viols, persécution des communautés LGBT, complicité avec le groupe terroriste Wagner, qui parallèlement pille l’Afrique ; la guerre en Ukraine est l’une des plus inhumaines que nous ayons connu depuis ces trente dernières années en Europe. Alors, Zelensky est en campagne. Au sens premier du terme.

Chef des armées, ne quittant jamais sa tenue kaki, son « théâtre » de guerre c’est le monde, sa « scène » politique c’est la communauté internationale, en étant sur le terrain, Zelensky est sur tous les fronts.

Nous, qui en France, grognons d’avoir des représentants hors-sol, par la force des choses, Zelensky offre une grande leçon de politique générale.

Plutôt que de se replier dans un entre soi, il sort de ses frontières et prend le risque d’être face à ses adversaires pour convaincre et vaincre. Et cela ne fait pas de lui un traitre, comme pourrait le penser certains, allergique au dialogue. Au contraire, s’il fédère autour de lui, c’est parce que fin diplomate il reste ausi droit dans ces bottes, dans la défense de sa ligne et des valeurs démocratiques. A l’ère du « pas de vague », Zelensky ne cesse de rappeler avec vigueur que lorsque les droits fondamentaux de la personne humaine sont atteints, ne pas prendre position est criminel ; mieux, que lorsque des vies sont en jeu, nous sommes tous concernés. Une grande leçon de droiture qui nous éloigne des intrigants dont la neutralité permet, peut-être, de gagner quelques postes, mais fait tant de mal aux fondements républicains, à nos institutions, aux élus, à l’Etat de droit et à la démocratie.

A vaincre sans péril on triomphe sans gloire, c’est ce qu’a compris Zelensky. Il est devenu en un an l’homme politique le plus connu et respecté au monde.

En étant accueilli partout, il prouve que nos valeurs héritées des Lumières sont universelles et non pas des lubies occidentales. Or, cet élan du monde dissone à certains égards avec notre situation interne jusque dans certaines salles de classes en France où des élèves remettent en cause l’étude de la Déclaration des droits de l’homme sous couvert d’impérialisme et de colonialisme.

Notre pays se fracture sous l’influence d’idéologies morbides qui remettent en cause nos principes d’ouverture et de cohésion citoyenne, notamment la laïcité. C’est la laïcité pourtant, qui permet, au delà de nos croyances ou de nos incroyances, de nous battre ensemble, pour les intérêts supérieurs du pays dans lequel nous vivons.

Alors que la laïcité est devenue en France un sujet à éviter, Zelensky, malgré lui et du fait d’un objectif transcendantal, en dessine l’esprit. D’origine juive, il rencontre le Pape et le lendemain les dirigeants de la ligue arabe pour gagner la paix. La leçon opère et lorsque Poutine et les réseaux sociaux continuent de l’accuser de nazisme, lui trace sa route.

Dès lors, la présence de Zelensky en fil rouge dans les quatre coin du monde, n’a pas seulement comme conséquence de gagner des soutiens pour l’Ukraine, il dessine, à son corps défendant, un récit mondiale. Plus que l’universalisme il fait naitre l’universalité ; plus que l’humanisme, il insuffle, (peut-être sans le vouloir), l’esprit d’humanité ; l’unité dans la diversité, la fraternité dans l’adversité.

Tout devient concret, il structure l’Europe, réanime l’OTAN, rend réelle la justice internationale, convoque le dialogue qui seul permet, il le sait, de sortir du chaos.

Artiste de l’histoire, il incarne en chair et en os, la politique au sens noble du terme, sans voiture ni de plat de lentilles.

Alors, une question de cohérence s’invite jusqu’à nous.

Comment est-ce possible de défendre nos valeurs démocratiques aux côtés de l’Ukraine sur la scène internationale et devenir plus fébrile lorsque les mêmes fondamentaux sont entachés au niveau national.

Comment soutenir haut et fort ce peuple ukrainien, en faisant des compromis sur la mise en oeuvre de la liberté, l’égalité, la fraternité et la laïcité en France ? De l’international jusqu’au local, il n’y a pas mille chemins pour faire taire la violence, rétablir l’autorité, protéger la société, la réparer et garantir la paix.

Or, porter l’humanisme, l’universalisme et les principes républicains, c’est avoir beaucoup de courage et un peu de sens politique.